Bouts de vie,  Réflexion

Et toi, ton confinement ?

Officiellement, le confinement touche à sa fin, mais la pandémie est loin d’être éradiquée et la prudence reste de mise. Ce qui est certain, c’est que face à cette période de crise exceptionnelle, on n’est, clairement, pas tous égaux. Selon notre situation professionnelle, le lieu où l’on habite et les personnes avec qui on la traverse, cela change complètement la donne.

Je pense à ces personnes enfermées dans des appartements « boîtes de conserve » qui tournent en rond comme un poisson dans un bocal ; celles en situation financière déjà difficile voire précaire ou disposant d’un statut professionnel compliqué et que la crise enfoncera d’avantage ; celles coincées avec un proche qui exerce sur elles des violences physiques ou psychologiques ; celles qui chaque jour se battent pour soigner ou pour continuer à faire tourner l’économie afin que nos quotidiens se retrouvent le moins possible impactés par tout ça ; et bien sûr, celles qui auront perdu un proche sans pouvoir correctement faire leur deuil.

Si les conséquences sanitaires et économiques sont bien sûr désastreuses, il ne faut pas négliger l’aspect psychologique qui pour beaucoup sera difficile à gérer… Que ce soit pendant la crise ou après, car on le sait : ce ne sera plus jamais « comme avant ».

Et moi, dans tout ça ?

Chaque jour, je me lève consciente de la chance que j’ai, car je fais partie des privilégiés. La pandémie serait survenue ne fut-ce qu’une semaine plus tôt, ça n’aurait pas été pareil, mais mon parcours de vie de ces dernières années m’a menée juste où il fallait pour pouvoir la traverser sereinement.

J’ai honte de l’admettre, mais je me rends compte qu’alors qu’on traverse une crise mondiale sans précédent et que les morts se comptent par milliers chaque jour, je ne me suis pourtant jamais sentie aussi bien. Déjà avant le confinement, mon compagnon l’avait remarqué : « c’est fou ce que tu as l’air plus épanouie ces derniers temps ! »

Alors, à l’instar d’Otis, je dis merci à la vie, car j’ai tout le nécessaire pour ne pas être impactée :

La maison, le travail, et la santé.

Le plaisir de la campagne

Il y a un an et demi, j’ai acheté ma petite maison perdue dans la campagne française. Avoir un jardin par temps de confinement, c’est clairement le luxe ultime. Ça me permet de prendre l’air sans pour autant « sortir de chez moi », et même de télétravailler au soleil quand la météo le permet.

Je respire les bonnes odeurs d’herbe fraîche, je me laisse bercer tantôt par le chant des oiseaux, tantôt par celui des criquets, parfois par celui de la tondeuse à gazon, et durant mes heures de temps libre, je me complais à photographier ce qui m’entoure.

Une solitude tempérée

La campagne présente un autre avantage : on ne s’y sent jamais vraiment seul.

Bien sûr, ne pas voir ses proches, c’est la partie la plus difficile du confinement. Et même si on comble avec des visioconférences régulières, on a naturellement besoin de vrais rapports sociaux. Alors je profite du peu que j’ai.

Il y a les petits vieux d’en face, toujours posés sur leur banc à regarder les gens qui passent, avec qui j’échange un « bonjour » et un sourire radieux chaque fois que je sors relever le courrier.

Il y a le voisin de derrière, d’une gentillesse exceptionnelle, qui vient tondre mon gazon et avec qui taper la discute par-dessus la clôture.

Il y a les voisins d’à côté qui jouent au foot tous les jours, les rires des enfants dans les jardins par jour de bon temps, les odeurs de barbecue qui viennent frustrer mon estomac et toutes ces petites choses qui donnent l’impression qu’au final rien n’a changé… Et surtout, le plaisir d’entendre gazouiller les oiseaux.

Les joies du télétravail

On dit que la chance sourit aux audacieux, et dans mon cas, c’est vrai ! J’ai quitté mon travail en Janvier, me disant qu’il faut parfois forcer le destin. Pas de droit au chômage, pas de taf en vue. J’ai finalement trouvé un nouveau job… Pile poil une semaine avant l’annonce du confinement.

J’ai donc eu une semaine pour faire la connaissance de mes collègues et commencer mon adaptation à l’entreprise, puis ce fut télétravail. Pour certaines tâches, c’est parfois un peu compliqué avec la distance, mais on a rapidement trouvé notre façon de nous organiser et je suis vraiment ravie de l’accueil qui m’a été fait pour que tout se passe au mieux malgré cette période compliquée ?

Le télétravail me permet de rythmer mes journées, du coup, la question de l’ennui ne se pose jamais.  En dehors des temps de trajet que j’économise, mon quotidien n’a finalement pas vraiment changé – si ce n’est que les bavardages avec les collègues ont été remplacés par l’écoute des ronflements du chat, qui doit d’ailleurs être ravie de ce confinement puisqu’elle a enfin sa maîtresse pour elle seule.

Quand MA norme devient LA norme

Je sais que pour beaucoup, se retrouver enfermé et contraint de ne voir personne est compliqué.

En tant qu’hypersensible avec un « mode de fonctionnement » qui diffère de la majorité, la solitude est mon havre de paix. Les relations interpersonnelles ont toujours été quelque chose de difficile à gérer pour moi, je n’ai donc naturellement jamais été une « grande sorteuse ».

Bien qu’une part de moi adore « faire la fête » avec mes proches et vibrer sur la musique, sortir épuise très rapidement mes réserves d’énergie. Mes sens explosent, c’est la surcharge émotionnelle et j’ai besoin de beaucoup de repos.

Dans la même veine, je n’ai jamais aimé le shopping (sauf au Japon 😉 ). Trop de bruit, trop d’odeurs, la foule est pour moi synonyme d’oppression (à l’exception des fosses de concert quand la musique me permet d’oublier le monde qui m’entoure !) et j’expédie toujours mes courses le plus rapidement possible.

Alors rester enfermée chez moi et restreindre mes sorties, c’est plutôt quelque chose d’habituel. L’ennui, je ne le connais pas vraiment : j’ai des piles de bouquins à lire, de jeux auxquels jouer, un catalogue Netflix loin d’avoir été exploré et plein d’idées créatives qui ne demandent qu’à s’exprimer.

Subitement, ce qui a toujours représenté MA norme est devenu LA norme… Autant dire que je me suis plusqu’aisément acclimatée à cette situation.

Faire face à soi-même

Une autre difficulté du confinement, c’est de se retrouver confronté à soi-même, ce qui pour beaucoup est simplement catastrophique, que ce soit par manque d’habitude ou à cause d’une mauvaise santé mentale.

Si à une époque, je craignais de me retrouver seule face à mes pensées qui m’agressaient en permanence comme un essaim d’abeilles bourdonnantes, aujourd’hui, j’ai appris à les dompter.

Ces dernières années n’ont pas été de tout repos : burnout, dépression, ESPT avec crise d’angoisse à la clé… Je me rends compte que toutes ces épreuves m’ont plus que préparée à la situation actuelle, et m’ont aidée à enfin trouver la sérénité intérieure que je recherchais tant. Je sais que je reviens de loin : j’ai parcouru un long chemin qui est le fruit d’un gros travail sur moi-même, issu de beaucoup de lecture mais surtout d’un bon suivi médical.

Avant, je pensais en permanence et de façon douloureuse, je n’arrivais pas à être ancrée dans le présent à force de ressasser le passé ou d’envisager le pire pour l’avenir et je culpabilisais tout le temps pour tout. Aujourd’hui, je fais le maximum pour réduire mes pensées et profiter de ce que la vie m’offre au quotidien.

Le bouton « mute »

On m’avait dit qu’il existait un bouton « off », je n’y ai jamais cru. Par contre, à mon grand étonnement, j’ai fini par trouver le bouton « mute ». Je sais que mes pensées défilent toujours, mais je choisis de ne plus les écouter, et par temps de crise où l’atmosphère ambiante est clairement anxiogène, ça me change vraiment la vie !

Je remballe la culpabilité, j’éconduis les angoisses liées aux évènements que je ne peux de toute façon pas contrôler, j’essaie autant que possible d’être dans « l’ici et maintenant ». Je ne crois pas que j’arriverai un jour à me couper complètement de toutes ces idées qui m’assaillent, mais parvenir à ne plus y faire attention, c’est déjà un pas énorme !

Bien sûr, ça demande aussi d’éviter au maximum tout ce qui peut les alimenter.

Aménager son quotidien

Pour réduire drastiquement toute source d’angoisse potentielle, j’ai réaménagé mon quotidien.

J’ai donc réduit mes sorties au maximum : faire les courses avec un masque n’est clairement pas agréable, alors je fais le plein et je n’y vais plus pendant un mois.

Je filtre les publications sur les réseaux sociaux dont je me coupe autant que possible pour ne pas me polluer l’esprit. J’ai remarqué que tout le monde s’est soudain découvert une vocation de commentateur d’actualité ou d’analyste politique. Je comprends bien sûr la colère, la tristesse, la frustration et le besoin de l’exprimer. Moi aussi, je ressens ces émotions, je suis consciente des injustices, des inégalités, des incohérences de nos gouvernements, et surtout, du fait que l’après-crise sera sans doute plus difficile encore à vivre que la crise en elle-même.

Mais au bout d’un moment, s’insurger en permanence sur les réseaux sociaux me semble contre-productif. Pourquoi ne pas plutôt utiliser cette énergie dans quelque chose d’utile, comme des actions solidaires ? Si on ne peut pas compter sur nos gouvernements, plutôt que de le fustiger en permanence, autant faire notre possible pour nous organiser « sans », non ?

C’est ce que j’essaierai de retenir de cette crise : les montées de solidarité et de partage – même si, hélas, les bonnes actions sont souvent rattrapées par la réalité politique et économique qui tentera de les tuer dans l’œuf ou de s’en servir pour mieux exploiter les citoyens, encore et toujours.

En conclusion ?

Je n’ai suivi aucune des injonctions à « réussir son confinement », l’époque est déjà suffisamment difficile que pour se rajouter des obligations absurdes. Alors non, je n’ai pas appris de nouvelle langue, écrit un livre, fait de sessions de sport intensive ou cuisiné mon propre pain. J’ai continué exactement comme je le faisais avant, avec les petits réaménagements nécessaires imposés par la situation.

Et je me sens plus épanouie que jamais.

La semaine, je télétravaille, et le week-end, bien souvent, je ne fais rien. Et c’est déjà très bien ! Car ne rien faire, c’est déjà faire beaucoup. C’est écouter son corps et lui offrir le repos dont il a besoin. C’est ne pas céder à la pression de la société qui nous impose d’être « tout le temps productif » (spoiler alert : c’est comme ça qu’on finit en burnout et qu’on devient incapable de la moindre once de productivité). C’est aussi s’autoriser à vivre ancré dans le moment présent, et à en profiter, tout simplement.

Bien sûr, mes proches me manquent, beaucoup. J’ai hâte de revoir mon amoureux ainsi que ma famille. Mais à côté, je me suis un peu trop habituée à ce manque de contacts sociaux et je sais que le « retour à la plus ou moins normale » me demandera une nouvelle phase d’acclimatation.

Finalement, ce confinement aura surtout été l’occasion de me redécouvrir d’une autre façon, et d’y faire la rencontre d’une personne que j’ignorais pouvoir devenir un jour : sereine, confiante, bien dans sa peau

Et de réaliser que si les rapports sociaux sont définitivement ma bête noire, puisque je parviens à commettre des impairs même à distance, il n’en est pas moins que mon plan de finir ma vie en ermite au bout du monde coupée de toute civilisation n’est pas une bonne idée, car je constate que j’ai, contre toute attente, BESOIN de ces rapports sociaux.

J’espère que pour vous, de votre côté, cette situation n’est pas trop dure à vivre. N’oubliez pas : envoyez valser les injonctions à « devoir faire quelque chose de votre confinement » et faites de votre mieux pour que votre quotidien vous soit le plus agréable possible. Chassez impérativement toute forme de culpabilité irrationnelle.

Et surtout, plus que jamais, prenez soin de vous.

Je vous laisse à quelques photos prises pendant le confinement… 🙂

3 Comments

  • Amélie Godin

    Oh Laura! Je suis tellement fière de la jeune femme que tu es devenue! Je trouve tes pensées tellement sages et tellement justes. Je t’envoie tout plein d’amour <3

    • MagicAly

      Tes photos sont magnifiques !!!

      Comme toi, je vis très bien ce confinement et je passe mes meilleurs week-ends
      J’adore le home working à travers lequel je gère mes journées comme je le veux

      Je suis bien

      Bon, je ne fais pas de homeworking tout le temps. Mais voila
      Quand je suis à la maison je suis bien

      Et comme toi j’ai eu la chance d’avoir ma maison avec jardin en décembre dernier ? ça fait un bien fou

    • Miluki

      @Amélie beaucoup de chemin parcouru depuis que l’on se connait 🙂 J’espère que de ton côté tout va bien, je sais que tu n’as pas un des métiers les plus faciles en ces temps de crise… Des gros bisous (à distance) <3

      @Aly j'avoue qu'avec ta maison, ton jardin et ton chien, vous êtes plutôt pas mal !! On a vraiment de la chance d'avoir une situation qui nous a permis de nous adapter plutôt facilement ♥

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